Premiers pas dans la vie active – Ambre Prouvost – Martin Fettuciari

Ambre Prouvost, co-réalisatrice du film Eugène, et Martin Fettuciari, co-réalisateur du film Pour une Poignée de Caramels, se sont envolés tous les deux pour le Canada et se sont installés dans la ville cosmopolite qu’est Montréal. Pour autant, ils se sont dégotés un poste chacun dans un studio correspondant à leurs compétences et leurs attentes.

Voilà presque une année qu’ils ont intégré leur studio respectif et travaillé sur des longs-métrages. Ambre a intégré de son côté le studio Reel Fx Animation tandis que Martin a rejoint les équipes de l’antenne Canadienne du studio Mikros Animation.

COMMENT S’EST PASSÉE LA RECHERCHE D’EMPLOI ?

Ambre Provost (A.P.) : Eh bien j’ai commencé avant la fin du cursus de l’ESMA a préparer un peu ma demoreel et m’arranger pour la finir le plus tôt possible pour la montrer au festival d’Annecy, puis la compléter pour le jury de fin d’études. En parallèle, j’ai eu la chance d’avoir été acceptée pour un permis vacance travail pour le Canada.

N’ayant pas d’offre concrète juste après le jury, j’ai décidé de partir pour Montréal et chercher sur place. Un peu angoissant de partir si loin sans promesse d’embauche mais cela a payé puisqu’une semaine et demie après j’étais recrutée en tant que Lighting et compositing artist chez Reel Fx Animation Studios, ce qui est super pour commencer.

Il ne faut pas hésiter à montrer aux studios qu’on vient pour eux et que l’on ne demande qu’à travailler. Il faut les contacter souvent sans avoir peur de les déranger, c’est aussi en étant présent au bon endroit au bon moment qu’on a une opportunité.

Martin Fettuciari (M.F.) : J’ai commencé à postuler en août, mais c’est principalement après la projection de septembre que j’ai envoyé le plus de demandes sur les sites des studios. J’ai eu peu de réponses mais j’ai réussi à avoir quelques entretiens avec des studio à Londres et Montréal. C’est sur LinkedIn que j’ai été contacté par Mikros Animation Montréal fin septembre après qu’ils aient vu ma demoreel. J’ai eu une réponse positive assez rapidement. Après trois semaines d’attente pour le visa je suis parti au Canada et j’ai commencé à travailler fin octobre.

QUEL EST TON POSTE ACTUEL ET EN QUOI CONSISTENT TES MISSIONS ?

A.P. : Je suis donc en Lighting et Compositing sur des longs-métrages d’animation. Ici à Reel Fx Animation Studios les deux départements sont en commun mais certains studios les séparent. Je suis chargée de lighter les scènes sur le logiciel Maya que nos leads ont préalablement préparé, lancer et gérer les rendus sur la farm, composer entièrement les plans sur Nuke et envoyer les rendus finaux. Nous avons des réunions tous les jours avec les superviseurs pour avoir des retours sur notre travail, il faut aussi savoir appliquer leurs remarques et présenter nos plans au directeur qui les approuve.

M.F. : Je suis actuellement anim TD, je gère le pipeline en animation, fix anim et confo anim. Je m’assure que tout le travail des artistes passe dans les départements suivants, principalement en créant des outils pour faciliter leur travail ou en allant régler les problèmes directement dans les scènes.

PEUX-TU NOUS RACONTER TES PREMIERS PAS DANS L’UNIVERS PROFESSIONNEL ?

A.P. : Je me suis tout de suite sentie très bien à Reel Fx Animations Studios. Étant dans mon premier travail, j’étais forcément un peu stressée et intimidée de travailler avec des artistes professionnels et me mettais la pression pour répondre au maximum aux attentes. C’est un grand studio mais j’ai vite sympathisé avec les gens de mon département et la production, qui sont très à l’écoute de toi et de tes besoins. J’ai vite progressé et ai pu apprendre beaucoup de choses sur leur pipeline et la chaîne de production d’un film d’animation en studio. Mes collègues, leads et superviseurs, sont très compréhensifs et c’est un vrai plaisir de travailler avec eux.

M.F. : Je suis arrivé en plein milieu de la production du film Bob l’éponge 3 et dès la première semaine j’ai commencé à aider et à régler des problèmes pour les animateurs. J’avais un peu la pression puisque certains problèmes empêchaient la production d’avancer, mais j’ai bien été aidé au début. Et il fallait aussi me familiariser avec tout le pipeline du studio assez rapidement.

COMMENT AS-TU VÉCU CETTE ENTRÉE DANS LE MONDE PROFESSIONNEL ? CELA CORRESPONDAIT À TES ATTENTES ?

A.P. : Je suis, honnêtement, très contente de mon entrée dans le monde professionnel. Je suis dans un bon environnement de travail, exactement les départements qui m’intéressent, bien entourée et les projets me plaisent. Je pense qu’on ne peut pas demander mieux pour se lancer. De plus, travailler complètement en anglais m’apporte énormément de nouvelles opportunités pour le futur.

M.F. : Je n’ai pas été déçu, ça correspondait aux retours que j’avais eu d’anciens élèves que ce soit sur le travail ou sur l’ambiance du studio.

QU’AS-TU RESSENTI ? COMMENT AS-TU VÉCU CE PASSAGE D’ÉTUDIANT À PROFESSIONNEL DE L’IMAGE ?

A.P. : Forcément un gros stress à la fin de l’ESMA. On sort d’un petit cocon qu’est l’école pour entrer dans un monde professionnel avec des tas d’artistes très talentueux et expérimentés. C’est aussi très stimulant, car on veut donner le meilleur de soi et faire ses preuves pour progresser. Je pense qu’il faut se donner au maximum d’autant plus quand on débute, autant au niveau du travail que dans la vie de tous les jours. Il faut quand même être prêt à bouger dans un autre pays si besoin, chercher activement des postes, trouver un appartement proche du travail, compter beaucoup plus sur soi-même etc. Je pense qu’il faut juste se donner les moyens d’y arriver et tout se passe bien.

M.F. : Très content de pouvoir travailler dans le studio d’animation que je voulais et de travailler sur de gros projets. Quelques doutes sur le fait d’avoir bien les compétences qu’il faut pour ce poste, mais au final on est très vite conforté dans le fait que c’est normal de ne pas tout savoir et encore plus si on est junior !

QU’EST-CE QUE ÇA FAIT DE TRAVAILLER SUR DES PROJETS PROFESSIONNELS QUI SERONT VISIBLES DU GRAND PUBLIC ?

A.P. : C’est vraiment une sensation incroyable, on a l’impression de vraiment passer professionnel et on se sent pousser des ailes ahah. J’étais toute émue à la sortie du long métrage SCOOB!, qui est mon premier projet dans le monde professionnel. Malheureusement je n’ai pas pu le voir au cinéma à cause du Covid mais savoir que milliers de gens voient ton travail est impressionnant et donne envie de s’investir encore plus. Je travaille actuellement sur le film Rumble qui va sortir en 2021 et j’ai tout aussi hâte, en espérant le voir au cinéma cette fois!

M.F. : Je suis content, très content de pouvoir participer à ces projets, d’avoir des retours des artistes et collègues sur mon travail et sur ce que j’apporte au studio. Malheureusement, le premier film sur lequel j’ai travaillé (Bob l’éponge 3) ne sortira pas en salle mais en VOD directement à cause du Covid, je suis quand même content d’avoir mon nom au générique !

Le changement de pays et de culture ?

A.P. : Je suis donc à Montréal depuis presque un an et j’apprécie énormément cette ville et culture québécoise. Les gens sont ouverts et sympathiques. Je n’ai eu aucune difficulté à m’adapter et l’opportunité de parler plusieurs langues est super. Les logements sont très demandés ici mais si l’on cherche activement il n’y a pas de problème, j’ai personnellement pu m’installer très rapidement. La seule chose qui puisse être un peu pesante est le manque des parents, de la famille. L’hiver est rude ici, mais supportable et la ville propose plein d’activités durant l’hiver, il n’y a donc pas de quoi s’ennuyer !

M.F. : Je suis content d’avoir commencé la vie active dans une ville où je voulais vivre, ça fait maintenant plus de 10 mois que je vis à Montréal. Je dirais que le plus compliqué est de s’adapter à la température très froide l’hiver et très chaude l’été !

APRÈS CES QUELQUES MOIS SORTIS POST-ÉCOLE, QUEL REGARD JETTES-TU EN ARRIÈRE ? SUR TA FORMATION ET L’ESMA ?

A.P. : Je suis contente d’avoir fait l’ESMA qui nous prépare bien techniquement pour notre entrée professionnelle. La dernière année, pendant la création du film, a été rude de par notre totale indépendance face à la réalisation d’un court-métrage entier mais j’en suis sortie grandie. Apprendre à travailler en équipe et très important et les studios favorisent toujours quelqu’un qui est à l’écoute, agréable et facile à vivre en groupe. Il faut aussi apprendre à avoir confiance en soi et bien se promouvoir auprès des studios, s’affirmer et être à l’affût des opportunités, car elles ne viendront pas toutes seules.

M.F. : Je suis content d’avoir eu une formation complète sur tous les domaines de la 3D. En tant que TD il faut connaître les besoins des artistes des département précédents et suivants pour mieux les aider. Avoir toutes ces connaissances me permet de comprendre facilement les problèmes et solutions.

COMMENT S’EST PASSÉE LA PÉRIODE LE COVID-19 POUR TOI ?

A.P. : J’ai eu la chance d’avoir une prolongation de contrat en Avril par Reel Fx Animation Studios ce qui m’a permis de ne pas me retrouver au chômage. Cela fait maintenant à peu près trois mois que je travaille à distance depuis chez moi.

M.F. : Dès les premiers cas à Montréal nous sommes passés en télétravail. Au bout d’une semaine tous les employés du studio travaillaient de chez eux et même encore aujourd’hui. Le studio a continué de fonctionner normalement sans arrêt de travail. Nous avons terminé la production de Bob l’éponge 3 et commencé celle de Paw Patrol sans problème. Je continue quoi qu’il arrive à faire des projets personnels pour mettre en pratique ce que j’ai appris.

ET TES PROCHAINS MOIS, OU L’ANNÉE À VENIR, COMMENT TE PROJETTES-TU POUR LA SUITE ?

A.P. : Eh bien j’ai récemment pu mettre à jour ma demoreel suite à mon travail sur SCOOB! et je projette donc de chercher des opportunités en fin d’année dans des studios d’animation à Montréal ou Vancouver. Je compte bien profiter du Canada au maximum ! J’espère pouvoir continuer dans les mêmes départements et prendre un maximum d’expérience en m’amusant autant que maintenant.

M.F. : Mon contrat n’est pas encore fini mais j’aimerais bien rester encore à Montréal quelques temps après et, si l’opportunité se présente, passer en rigging chez Mikros Animation ou peut-être dans un autre studio.