Franck Delfortrie
Matheux dans l’âme, amoureux du dessin, passionné de jeux vidéo, Franck Delfortrie a mis un certain temps avant de trouver sa voie. Après une licence de maths, une bifurcation par le cursus Cinéma d’Animation 3D de l’ESMA, il exerce désormais avec bonheur dans le domaine du jeu vidéo et se félicite de l’efficience de la formation de notre école qui lui a permis de gérer au mieux l’évolution de sa carrière.
Retour sur tes années ESMA
Quelles sont les raisons qui t’ont amené à choisir la voie de l’animation 3D ?
J’ai toujours été très bon en mathématiques. J’ai toujours aimé dessiner. Par ailleurs, j’étais un grand passionné de jeux vidéo. Après le bac, j’ai entrepris une licence de mathématiques et computing mais je ne me voyais pas être prof de maths, ni bosser dans l’armée pour cracker les codes, ni dans les banques. Comme je continuais à dessiner, un ami m’a dit pourquoi ne t’orienterais-tu pas vers l’infographie 3D ? Je faisais aussi pas mal d’informatique avec les maths, j’ai alors décidé de m’orienter dans cette voie.
Et pourquoi l’ESMA ?
J’ai d’abord intégré une autre école à Montpellier durant un an. J’avais de bons résultats. J’ai regardé ce que faisaient d’autres structures et notamment l’ESMA. J’ai été abasourdi de voir le haut niveau de cette école comparée à la mienne. J’ai donc migré et j’ai recommencé en première année à l’ESMA qui m’a apporté le bagage technique de qualité que peu de structures artistiques proposent, selon moi. J’ai fait trois années, ce qui était la durée du cursus à cette époque.
Ce qui peut paraître curieux, c’est d’avoir choisi la formation 3D alors que tu avais plutôt le goût du jeu vidéo ?
C’est vrai ! En fait, c’est venu petit à petit. Au fil du temps, j’ai su que c’était le jeu vidéo qui m’attirait vraiment. La formation 3D de l’ESMA est très gratifiante et très qualitative. Je ne fais pas de la fausse politique (sic) mais l’ESMA c’est très positif. C’est que du bonus !
Cette formation me sert encore quotidiennement. Elle m’a permis de m’épanouir dans le jeu vidéo même si au départ ce n’était pas la filière idéale. J’avais des bases notamment techniques et artistiques véritablement très solides au-delà de ce que j’aurai eu en école de jeux vidéo. Le premier job que j’ai trouvé, c’était d’ailleurs dans le secteur du jeu vidéo.
Ton parcours professionnel
Justement comment s’est déroulé l’intégration dans le milieu professionnel ?
J’avais un peu d’inquiétudes de ne pas avoir fait du jeu vidéo. Au final, cela s’est bien passé ! J’ai commencé à Montpellier juste à côté de l’ESMA à l’époque, à Feerik Games. J’étais à l’aise avec les consignes, je n’ai eu aucun problème. Pour l’anecdote, j’ai un peu menti sur ma connaissance d’un logiciel, Autodesk 3ds Max. J’ai appris le logiciel en autodidacte en quelques jours. Il ne faut pas avoir peur de la technique du moment que le fond est bon, solide. Ensuite, je suis arrivé chez Magic Pockets comme infographiste 3D. Je suis devenu lead artist au bout de deux mois. J’avais 25 ans, je devais manager des gens de 40-45 ans. Très rapidement grâce à une certaine confiance en moi et avec les bases de l’ESMA, j’ai pu évoluer. Au bout de deux ans, j’étais Associate Creative Director. Une grosse montée en puissance ! Je m’occupais à la fois de la partie design et de la partie Art.
Tu te sentais complétement à l’aise ?
Tout à fait ! Avec en plus des compétences sociales et de management d’équipes, cela s’est bien passé !
Où exerces-tu actuellement ?
Actuellement, je suis chez Shiro Games à Bordeaux en tant que Game Director. Je m’occupe de manager intégralement la production de jeux. Concrètement, je chapote deux projets : Dune : Spice Wars, qui est tiré de la licence de Franck Herbert, et Northgard. Cela va de la création du jeu, à la maintenance, aux problématiques, aux interviews. Mon rôle c’est celui d’un chef d’orchestre !
Comment caractériser ces jeux ?
Ce sont des jeux de stratégie, de gestion de vie et de stratégies militaires. Dune sort l’année prochaine, il est actuellement en early acces. Northgard est sorti il y a quatre ans.
J’ai aussi bossé sur Les Schtroumpfs, les Lapins Crétins, les Tortues Ninja, Cartoon Network entre autres. Celui dont je suis le plus fier c’est Dune.
Quelle est l’évolution notable dans le jeu vidéo depuis quelques années ?
Il y a toujours eu une progression de la technique apportée par le cinéma. Une course vers le réalisme ! C’est un peu asymptotique maintenant ! Du coup, on peut de moins en moins faire mieux que les précédents jeux sur la perfection du rendu, par exemple. Ce qui nous rattrape en ce moment, c’est la prise de conscience de l’écologie sur les jeux.
Les sujets de société impactent donc le jeu vidéo ?
Oui, clairement. On se dit, mon jeu est de plus en plus joli, de plus en plus gourmand en termes de ressources graphiques, etc. au détriment de la planète puisque cela demande de plus en plus d’énergie, des ordinateurs de plus en plus puissants, des mises à jour régulières. Nos clients prennent conscience de cela et s’interrogent : au lieu de faire un jeu plus beau comment pourrait-on faire un jeu qui demanderait moins de ressources, qui serait plus écologique. Je ressens cette attente. J’espère que l’on continuera dans cette voie : faire des jeux plus calmes (sic) écologiquement. Le monde des développeurs va devoir en tenir compte.
Tu es aussi vice-président de SO Games. Qu’en est-il de cette structure ?
C’est l’association officielle des professionnels du jeu vidéo en Nouvelle-Aquitaine. C’est l’aspect politique de mon travail en tant que bénévole. Nous travaillons auprès des écoles pour aider à la formation des étudiants avec les autres entreprises de jeux. Nous sollicitons la Région, tentons de débloquer des fonds pour les petites structures, créons des événements, développons la culture du jeu vidéo, etc. C’est notre mission !
En conclusion
As-tu rencontré des gens de l’ESMA dans ta carrière ?
A Magic Pockets, j’ai recruté des anciens de l’ESMA. Je vois encore des amis de ma promo. Nous étions très soudés. L’ESMA c’est un peu une congrégation qui rayonne dans le monde entier.
Dans 5 ans, où seras-tu ?
Pour l’instant je suis bien où je suis ! J’ai un peu atteint le maximum dans le jeu vidéo. Lorsque tu es Game Director tu ne peux pas espérer mieux. Je connais tout le monde à Shiro Games, c’est une très bonne boite française à taille humaine. A priori, je me vois continuer comme cela. Mais je ne sais pas ce que je ferais dans cinq ans. Je suis quelqu’un d’assez sanguin donc je peux du jour ou lendemain changer de voie. Je me laisserai porter par le vent !
Une ultime ambition dans ta tête ?
Continuer à être heureux, me lever tous les matins en étant content d’aller au travail avec la patate. Et aussi continuer un travail associatif à côté comme SO Games.
Des conseils pour les futurs étudiants ?
Mettre son égo de côté et toujours miser sur la franchise ! C’est un métier dans le jeu vidéo où il y a beaucoup de gens talentueux. Il faut respecter le travail des autres, savoir se remettre en question, faire attention à l’image qu’on donne en étant franc avec les gens et apprendre à dire les choses.