Brice Dublé
promotion 2017
Animateur 3D
Travaille actuellement chez : Illumination Mac Guff
Après un détour par des études de commerce, Brice Dublé, passionné de dessin, a laissé libre court à sa passion pour les disciplines artistiques à l’ESMA Toulouse. Il est désormais animateur chez Illumination Mac Guff.
Retour sur tes années ESMA
QUEL A éTé TON CURSUS AVANT D’INTéGRER L’ESMA ? ET TON PARCOURS à L’ESMA ?
Depuis que je suis enfant, je dessine. J’ai retrouvé des dessins qui datent de la maternelle. Très jeune, je regardais aussi pas mal de dessins animés, genre Disney. Mais je ne me voyais pas faire ma carrière dans ce domaine. C’était un hobby ! Du coup, je n’ai pas orienté mes études dans cette direction. Je continuais pourtant à dessiner des personnages récurrents comme les Zorilles de Corcal et Deth. Je mettais ces personnages dans plein de situations, je dessinais en cours.
J’ai entrepris des études orientées vers le commerce, science technologie de la gestion. Ensuite j’ai fait un BTS NRC (Négociation, Relation Client). Durant ce BTS, un ami m’a dit « Brice tu dessines vraiment bien, tu devrais travailler pour Pixar ou autres« . Ça a fait tilt ! Mes études commerciales ne me plaisaient pas vraiment. Du coup, je me suis renseigné et j’ai découvert l’ESMA à Toulouse, ma ville.
J’ai fait un book pour candidater sauf qu’il y avait un problème, c’était le coût. J’ai donc travaillé à en restauration rapide pour financer mes études. J’ai alors pu envisager d’intégrer l’ESMA en commençant par la MANAA. Révélation : c’était la première fois que je faisais des devoirs à la maison qui me plaisaient à ce point. Faire des carnets de croquis, ce sont les meilleurs devoirs que j’ai eu à faire de toute ma vie (sic).
POURQUOI AVOIR FAIT LE CHOIX D’INTéGRER UNE FORMATION CINéMA D’ANIMATION 3D ? QUEL EST TON RESSENTI DU CYCLE D’éTUDES ?
Lors de la MANAA, l’idée a germé d’intégrer la section 3D. Je me disais que depuis que je suis gamin ça m’a toujours plu, alors pourquoi pas faire cela comme métier ? C’était un rêve. Je considérais à peine cela comme un travail puisque de toute évidence, c’était une passion. Un peu comme un musicien !
A l’époque, le cursus 3D durait trois ans. C’était très dur au début. Je ne suis pas un grand fan d’informatique. Un ami, Nicolas Jacomet, m’a prêté son ordi, sans lui je n’en serais pas là où j’en suis aujourd’hui. Les profs m’ont permis de maîtriser les logiciels en deux ans. Au bout d’un moment la technique s’efface, tout devient automatique et l’artistique émerge. Les projets proposés par les professeurs étaient très stimulants, chacun pouvait apporter sa patte artistique.
QUID DE TON FILM DE FIN D’éTUDES ?
Nous sommes partis avec mon groupe (NDLR : Maxime Guerry, Robin Cioffi, Stanislas Gruenais, Lamia Akhabbar, Alexia Portal) sur la question « qu’est-ce qui arrive aux chaussettes qui disparaissent ? ». Une idée de Robin Cioffi avec en parallèle le constat qu’il y a la même bactérie sur les pieds que sur le fromage. On a trouvé l’histoire en 20 minutes sur une table dehors pendant la pause. Nous avons relié le fromage avec des souris qui pressent le jus des chaussettes. Nous tenions notre idée ! Le film s’appelle Made in France.
Ce film fut une expérience enrichissante, en condition de production comme si nous étions dans un studio. On gérait tous les aspects : script, storyboard, création des personnages, animation, rendu. Les membres de mon équipe étaient les meilleurs pour moi. Nous n’avons eu aucune divergence artistique. C’est très stimulant intellectuellement et prenant physiquement. On donne le meilleur de soi-même. Je travaillais toujours en parallèle, il fallait que je gère bien mon temps, que je réfléchisse à être efficient car j’avais moins de disponibilité. Je sais que notre film a été primé à plusieurs reprises à travers des festivals internationaux.
COMMENT S’EST PASSéE TON IMMERSION PROFESSIONNELLE APRèS LA SORTIE DE L’ESMA ? QU’ESPéRais-TU APRèS LES éTUDES ?
Lorsqu’on sort de l’ESMA, on est apte à intégrer le monde du travail mais il faut s’adapter aux critères des studios. Pour ma part, j’avais une idée précise : je voulais travailler pour Illumination Mac Guff.
Après la remise des diplômes, le lendemain lors du jobfair (ndlr : temps de recrutement organisé par l’ESMA entre les studios qui viennent au jury et les étudiants), j’ai montré aux représentants d’Illumination Mac Guff, mon travail. A priori, ils n’étaient pas intéressés.
Un mois après, Mac Guff a organisé une soirée de recrutement, c’était le 4 octobre 2017, je m’en rappelle. Je n’étais pas invité mais j’y suis allé quand même avec Nicolas Jacomet. Au culot, je me suis incrusté. Du coup, j’ai pu montrer mon travail à certains recruteurs qui nous ont laissé un mois supplémentaire pour envoyer une bande démo plus aboutie. Finalement, j’ai été recruté ! J’ai commencé le 4 décembre 2017 en tant qu’animateur d’arrière-plan (crowd) à Paris.
Et aujourd’hui je suis toujours chez Illumination Mac Guff !
Ton Parcours professionnel
PARLE NOUS DES DIFFéRENTS PROJETS SUR LESQUELS TU AS éTé AMENé à TRAVAILLER ?
J’ai commencé sur le film Le Grinch. Après, j’ai enchaîné pendant deux mois au marketing. Je ne suis pas resté car au final je n’avais pas le niveau attendu pour ce département. Parallèlement, ils ont réduit les équipes puis finalement j’ai été rappelé pour travailler sur Les Minions 2. A la fin de ce projet, on m’a proposé une formation en interne pour pouvoir travailler sur des personnages principaux.
J’ai été promu, j’ai travaillé sur Sing 2 (Tous en scène 2). J’avais adoré le 1 lorsque j’étais étudiant. C’était génial ! Je travaille actuellement sur des projets dont je ne peux pas vous révéler le nom, je suis sous contrat d’exclusivité.
PEUX-TU NOUS PARLER DE TON MéTIER ? EN QUOI CONSISTE-T-IL ET EN QUOI TE PLAîT-IL ?
J’aime bien prendre l’exemple des marionnettes. En gros, on donne vie à quelque chose qui est inanimée. On fait défiler des images et le cerveau a l’impression que c’est quelque chose de continu, du coup la marionnette se meut dans l’espace. Elle est vivante. Pour cela il faut respecter certains principes de poids, de timing, etc. Mon rôle, au final, une fois le personnage livré par les départements précédents, c’est de le faire bouger à différents moments en respectant une bande son. Tout cela en conformité avec le cahier des charges.
Nous avons une créativité restreinte mais pas dans le mauvais sens du terme. C’est-à-dire que l’on peut faire jouer le personnage comme on le souhaite tout en respectant l’état émotionnel à tel moment de l’histoire. On évolue librement au sein de règles préétablies par des superviseurs qui eux-mêmes en réfèrent aux directeurs d’animation. L’homogénéité, la fluidité, sont primordiales. Globalement, je me régale !
TA SPéCIALISATION ?
Je travaille plutôt sur le cinéma de long métrage. Lorsque je vois l’effet produit au cinéma dans la salle, c’est top !
AVEC QUEL STATUT ?
Je suis intermittent ! Je suis en contrat dit d’usage. Parfois, ce n’est pas évident pour trouver un logement, par exemple. L’avantage d’être dans un gros studio, c’est qu’il travaille en flux tendu et qu’il y a peu de périodes de disette. En cinq ans, j’ai peu connu d’interruptions.
COMMENT AS-TU VéCU L’éVOLUTION DE ton secteur DEPUIS L’OBTENTION DE TON DIPLôME ? ET COMMENT VOIS-TU SON éVOLUTION DANS LES ANNEéES à VENIR ?
Dans mon domaine, pas réellement de changement. Juste une remarque il a des outils très pratiques, spécifiques, dédiés à chaque corps de métier. Cela permet de gagner de temps. Les principes édictés par ceux qu’on appelle les Neufs sages de Disney sont toujours valables avec les « Douze Principes de Base de l’Animation ». Ce sont les règles que suivent, même aujourd’hui, les réalisateurs et animateurs pour réaliser un film d’animation. Un médium très spécifique.
QUELLES SONT LES QUALITéS QUE TU DOIS AFFICHER DANS TON TRAVAIL ?
Il faut avoir un bon sens de l’observation. Exemple : quand on regarde marcher un oiseau, cela n’a rien à voir avec un humain. On voit que la tête du volatile est une sorte de steadicam. Le corps bouge, la tête reste au même endroit. Voilà le type d’observation qui peut servir.
Ensuite, le dessin est important à mon sens, mais cela n’est pas forcément nécessaire. C’est utile pour avoir de belles lignes de force.
Pour conclure
ET DANS 5 ANS, OU SERAS-TU ? UNE AMBITION ULTIME à MOYEN OU LONG TERME ?
J’espère toujours être chez Illumination Mac Guff ! Réaliser mon propre un court métrage, ce serait pas mal. De A à Z, tout développer. Avec ma compagne on a réfléchi à certaines choses. C’est une ancienne étudiante de l’ESMA, Melissa Roussilhe, elle a fait motion design et design graphic.
DES CONSEILS POUR LES FUTURS éTUDIANTS…
Je prendrais l’exemple de la saga Rocky, pour le message de fond : toujours poursuivre ses rêves. Dans Rocky Balboa (sixième film de la série), Rocky dit « toi moi, n’importe qui, personne ne frappe aussi fort que la vie, ce n’est pas d’être un bon cogneur qui compte, l’important c’est de se faire cogner et d’aller quand même de l’avant, c’est de pouvoir encaisser sans jamais, jamais flancher. C’est comme ça qu’on gagne. » C’est le message simple, efficace et plutôt très fin à mon avis. Beaucoup pensent que c’est bourrin (sic), c’est loin d’être le cas !
A propos de combat, je dois dire que lors de mon cursus à l’ESMA, je pratiquais du MMA, deux fois par semaine, pour évacuer la pression. L’activité physique, ce n’est pas négligeable !
Crédit images : Brice Dublé & Illumination Mac Guff